Le warrantage
Entrepôt communautaire
Ouoro – 2021 – 2025
Pouvoir stocker les récoltes au village et recevoir un prêt en attendant des cours meilleurs que ceux pratiqués juste après les récoltes, période d’extrême abondance sur les marchés.
Cet article précise les objectifs du warrantage, le bilan de son année 1 et la description de sa mise en place dans le village de Ouoro.
L’objectif du Warrantage
Stocker les récoltes en attendant des cours meilleurs que ceux pratiqués juste après les récoltes, période d’extrême abondance sur les marchés : or très souvent les petits paysans burkinabè vendent au plus bas des cours car les besoins financiers sont importants à cette période (soins de santé, frais de scolarité des enfants)
Le système fonctionne de deux façons :
– Comme simple lieu de stockage : un « loyer » est alors perçu auprès des paysans de 50 FCFA par sac de 50 kg déposé à l’entrepôt.
– Comme clef pour accéder à du crédit pour ceux qui en ont besoin : on évalue alors la valeur du stock déposé au prix courant du moment et on va ensuite consentir un prêt qui ne porte pas sur l’ensemble de cette valeur…Exemple, si le dépôt est estimé à 60 000 FCFA, le paysan peut disposer d’un prêt de 50 000 FCFA, somme qu’il remboursera quand il vendra sa récolte à laquelle il ajoutera un intérêt sur prêt de 5 %.
A l’aune des expériences menées dans d’autres villages, il est clair que les bénéfices à tirer de cette démarche peuvent être importants : une estimation moyenne parle d’une hausse possible des cours des produits agricoles de 50 % dans un délai de 3 ou 4 mois après les récoltes.
L’objectif économique et social de ce dispositif d’entrepôt communautaire est donc que ce soient les paysans qui travaillent la terre qui puissent bénéficier de meilleurs revenus, et non les commerçants qui stockent les denrées achetées après les récoltes.
Bilan de la 1ère année de fonctionnement
juillet 2024
Sous la conduite du formateur principal, Maurice YAMEOGO, et en collaboration avec nos correspondants locaux, une évaluation du dispositif s’est déroulée courant juillet,
grâce à une bonne tenue des cahiers de stocks et de compte par le COGES (comité de gestion)
Les bénéficiaires
– 4 groupements et 93 personnes physiques, essentiellement des femmes ont déposé dans l’entrepôt
. Les warrantés (ceux qui ont sollicité un emprunt) : 1 groupement et 42 personnes physiques. Ils ont permis soit d’assumer des « dépenses sociales » (santé, école ou autres) ou de s’engager dans des AGR (Activités Génératrices de Revenus) pour 25 d’entre eux.
. Les non warrantés (qui n’ont fait qu’entreposer leur stock) : 3 groupements et 51 personnes.
La nature des dépôts
– 13 tonnes environ ont été stockées : pour l’essentiel du niébé (haricots) et arachides.
Les Comptes
– Les warrantés ont générés 8 300 Fcfa (12,65 €) de frais de stockage et 40 150 Fcfa (61,20 €) d’intérêts pour le prêt (5% environ), leurs emprunts se sont élevés globalement à 783 000 Fcfa (1 193,67 €)
– Les non warrantés ont générés 6 400 Fcfa (9,75 €) frais de stockage.
– Au total 54 850 Fcfa (83,62 €) sont rentrés dans le fonds du COGES
Année 2 – Warrantage
décembre 2024-2025
L’entrepôt fonctionne de nouveau et les dépôts de récoltes sont en cours.
En amont, les dispositions suivantes ont été prises :
– Un stage de renforcement des compétences pour le COGES.
Le COGES a pris la décision de réajuster les montants des frais de stockage sans emprunt qui passent de 50 à 250 FCFA (le sac de 50 kg ou le bidon de 20 litres) dans le souci d’obtenir une autonomie financière de l’entrepôt.
Voir Le Rapport de formation/recyclage du COGES où sont présentés les différents cahiers à remplir
– Une reprise des réunions de sensibilisation dans les quartiers
– L’achat d’un complément de palettes
– Alphonse Sama se verra confier le rôle d’animateur attaché à l’entrepôt
Le warrantage à Ouoro
– La mise en place –
Le projet a été élaboré avec nos correspondants Paul BAMOGO et Alphonse SAMA
Sensbilisations – Formations – Construction
Un terrain pour l’entrepôt
En novembre 2021 un relevé de palabre (voir) octroie un terrain dans le village de Ouoro pour construire l’entrepôt de warrantage et son aire de séchage.
Sensibilisations des villageois :
En avril et mai 2022
– Sept (07) réunions se sont déroulées dans les différents quartiers de Ouoro et à Ouettin.
– Une visite du centre de warrantage du village de DOULOU (actif depuis 2019) :
plus d’une vingtaine de personnes (deux à trois représentants de quartier désignés à la suite de chaque réunion de sensibilisation + l’agent agricole de Sourgou). La délégation comprenait une majorité de femmes (15) et à Doulou, les responsables locaux ont expliqué que les femmes étaient d’ailleurs les utilisatrices majoritaires de l’entrepôt.
La visite a permis d’écouter, en mooré, un exposé détaillé sur le fonctionnement de l’entrepôt par le président local du comité de gestion, puis de constater que l’entrepôt était rempli (le comité local semble même déjà presque dépassé par les sollicitations) et d’échanger avec les paysans utilisateurs.
Suite à cette visite, une délégation de Doulou at été reçue à Ouoro, intéressée par l’élevage solidaire.
Le choix de Doulou a été fait parce que Doulou développe un projet de warrantage autogéré très proche de l’esprit du projet que nous développons à Ouoro.
En 2020 une première visite-découverte avait été faite par Mil’Ecole et nos correspondants locaux. Voir : Le Compte Rendu détaillé de notre visite à Doulou où est exposé en détail leur gestion financière du warrantage.
En octobre 2023
– Un nouveau cycle de sensibilisation dans les différents quartiers du village pour s’assurer du fonctionnement optimal de l’entrepôt communautaire à l’occasion de la campagne agricole de la fin d’année 2023,
Désignation et formations du comité de gestion
– 1 journée en AG pour désigner un Comité de Gestion de l’entrepôt (COGES)
– 4 jours de formation (tenue des cahiers de gestion) pour les 5 membres du COGES en décembre 2022.
– En février 2023 une formation concernant le conditionnement des récoltes et l’entretien de l’entrepôt, en parallèle avec la mise en service effective de l’entrepôt.
Voir Le Rapport de formation des membres du COGES
Construction des bâtiments et équipement
Il s’agit de l’entrepôt avec bureau et aire de séchage qui s’est déroulée parallèlement aux sensibilisations et formations.
– Une réception provisoire des travaux eu lieu début février 2023 sous la conduite de nos correspondants locaux et en présence du représentant de Pi. ingénierie (entreprise indépendante chargée du contrôle qualité).
Il est prévu un an plus tard une réception définitive qui débouchera alors sur le versement de la provision de 10% actée dans le contrat avec l’entreprise qui a mené les travaux.
– L’achat de l’équipement en matériel de stockage : palettes, produits d’entretien, sacs à triple fond
Le financement
Le projet a impliqué une participation financière de Mil’Ecole et de Kel toulois (porteurs du projet) et de leurs bailleurs (Agence des micro-projets, CD54, Région Grand Est) qui a porté sur les aspects suivants :
– La construction de l’entrepôt et de l’aire de séchage ;
– Le financement des sensibilisations, visites et formations ;
– L’achat du matériel de stockage en année 1 (palettes, produits d’entretien, sacs à triple fond) ;
– Une avance en numéraire pour permettre en année 1 l’octroi de prêts aux paysans déposant leurs récoltes et de salarier un gardien.
Un compte bancaire spécifique warrantage a été ouvert.
La participation de la population locale a été sollicitée de 2 manières :
– pour l’octroi du terrain ;
– pour apporter des matériaux (sable, gravier et pierres) et de l’eau pendant toute la durée du chantier.
Vers une autonomie
L’objectif annoncé est d’atteindre progressivement (sur trois ans) l’autonomie totale de l’entrepôt, c’est alors le comité de gestion qui gérera sur ses fonds propres (revenus liés à la location ou aux intérêts des prêts octroyés) le fonctionnement du dispositif (prêts, salaires du gardien, matériels divers)